Entrer à nouveau dans le bar de Saint-Fargeol tenu aujourd’hui de façon remarquable par Madame Félicie Dechartre, 95 ans, puis traverser la boutique de l’ancienne boulangerie attenante et nous voilà dans une anamnèse de nos papilles !
Le massepain de Saint-Fargeol était une spécialité à l’amande connue dans la région et au-delà, appréciée de nombreux gourmets et réalisée grâce au savoir-faire d’Aimé Dechartre (1896-1971), puis de son fils Jean Dechartre (1932-1994), issus déjà d’une famille de boulanger et tous deux diplômés de pâtisserie.
Dans la grande pièce située à l’arrière de la maison construite en 1866, tout commence dans la grande sébile en châtaigner suspendue par 3 cordes au plafond près de la cuisinière à bois. Les amandes, préalablement émondées sur place, y sont broyées sous une boule de cuivre lancée en mouvement circulaire grâce à la mobilité de la suspension.
Le four construit en briques occupe tout le pan de mur près du grand pétrin. Pendant que le four chargé au charbon de Messeix (1), dont le calibrage permet une bonne répartition de la flamme, atteint la bonne température, les pâtissiers concoctent la pâte à massepain mélangeant blancs d’œuf, sucre et amandes. Les jaunes sont récupérés pour faire des petites brioches décorées de fines dents.
La pâte est ensuite couchée sur les plaques de cuisson à l’aide d’une poche à douille formant de jolis ronds réguliers de 4 cm environ pour des fournées de 6 à 9 livres.
Aimé et Jean Dechartre passent leurs bras nus régulièrement dans la chambre de cuisson du four pour vérifier la température et décider de l’enfournement. Est-ce là l’une des clés de réussite des massepains de Saint-Fargeol pour leur couleur, moelleux et croustillant ?
Les massepains étaient fabriqués les samedis, dimanches et jours fériés. Les jours de fêtes ils accompagnaient idéalement une coupe de champagne. Pour les voyageurs de retour sur Clermont, Limoges, Lyon, Paris ou Vichy, ils constituaient un cadeau de vacances apprécié.
Sources :
Interview de Félicie Dechartre, épouse de Jean Dechartre le 28 août 2024
.(1) Messeix est une commune du Puy-de-Dôme, située au sud-ouest du département, où les mines de charbon furent exploitées de 1831 à 1988.