ALEXANDRE VARENNE : DE “LA MONTAGNE” AUX PLAINES DU TONKIN

5 juin 2023 | Personnalités

Le 28 juin 1919, le Traité de Versailles est signé.
Le 2 octobre, la Chambre majoritairement à droite entérine les accords passés par Georges CLEMENCEAU qui sera pourtant mis à l’écart lors de la prochaine élection présidentielle pour laquelle Alexandre VARENNE s’abstiendra.
Après que des contacts aient été établis entre les socialistes du Puy-de-Dôme et de l’Allier, ces derniers ont émis le souhait de voir créer un organe de presse quotidien qui soit l’expression du socialisme dans cette région centrale. Ils se sont naturellement tournés vers Alexandre VARENNE qui crée ainsi un journal unificateur des gauches auvergnates : LA MONTAGNE. Alexandre  VARENNE écrira alors : « Né le 4 octobre 1919 dans l’ombre tutélaire du Puy-de-Dôme, il renvoie à la Montagne, groupe des gauches en haut des gradins dans les premières assemblées des représentants du peuple au lendemain de 1789».
En 1924, Alexandre  VARENNE promeut le cartel des gauches, c’est-à-dire de l’entente avec les radicaux, cartel qui remporte les élections législatives et qui envoie Alexandre  VARENNE à la Vice-Présidence de l’Assemblée. Le Gouvernement lui offre, à 55 ans, le poste très convoité de Gouverneur Général de l’Indochine, fleuron de l’Empire composé d’une colonie, la Cochinchine (Sud-Vietnam), quatre protectorats de l’Annam et du Tonkin (Centre et Nord du Vietnam), du Cambodge, du Laos ainsi que du territoire à bail chinois de Kouang-Tchéou-Wan, territoires assimilés par VARENNE à «une bijouterie de luxe dans un quartier malfamé». Il y croisera un autre Pionsatois : Antoine CHABASSIERES, trésorier-payeur au Cambodge.
Si à première vue, l’Indochine semble immuable, derrière les scènes pittoresques d’alors se cachent de profondes mutations. Des fortunes considérables se sont construites et des inégalités criantes sont apparues. En effet la colonie connait un boom économique grâce aux productions agricoles traditionnelles, riz notamment, mais aussi les productions de charbon et de caoutchouc en forte croissance.
Les bénéfices s’envolent, les salaires demeurent dérisoires et la politique sociale quasi-inexistante.
Le jeune Nguyen Ai Quoc, devenu HO CHI MINH crée l’Association de la jeunesse du Vietnam, futur socle du parti communiste indochinois
Dès son arrivée à Saigon, les grands bourgeois de Cochinchine lui ont remis un cahier de vœux modérés qui reprenait les revendications des leaders constitutionalistes. Alexandre VARENNE, sentant qu’un courant nationaliste se développait, se met à l’ouvrage pour transformer ce territoire plus grand que la métropole :
• rétablissement des comptes pour le financement de grands projets,
• démocratisation du système scolaire, notamment en milieu rural,
• mise en œuvre d’une politique de crédit à taux d’intérêts bas,
• adjudications publiques lors de l’octroi des concessions territoriales,
• adoption d’un Code du travail et création d’une inspection du travail,
• instauration de règles en matière fiscale,
• ouverture aux Indochinois des emplois dans l’Administration,
• mise en place d’une politique de vaccination,
• renforcement de la sécurité, tant au plan intérieur qu’extérieur.

L’historien Guy ROUSSEAU écrira : «Alexandre VARENNE aura passé trente mois à la tête de cette colonie en mettant en œuvre une politique de réformes humanistes et progressistes sans rompre avec l’idéal colonisateur et civilisateur»
Ce vaste programme va inévitablement froisser des intérêts et bouleverser des positions acquises à tel point que l’intégrité de VARENNE sera mise en cause. Les attaques à son encontre vont se multiplier.
Un vote sera organisé à l’Assemblée, il sera largement minoritaire, mais une enquête sera déclenchée : elle blanchira Alexandre VARENNE qui cependant en restera durablement affecté.

Sources :
-le Colloque 2021 animé par Anne-Sophie SIMONNET, journaliste à La Montagne
-le livre de Jean FILLIOZAT : Alexandre VARENNE, d’une « Montagne » à l’autre