Dans les Combrailles, qu’y a-t-il de commun entre les églises de La Crouzille, Ars-les-Favets et Saint-Priest-des-Champs ? Leur cœur a été décoré par le peintre fresquiste Louis DUSSOUR.
Natif de Riom, Louis DUSSOUR suit l’enseignement des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand puis de Paris, prépare le concours de professeur de dessin qu’il réussit en 1926.
Il intègre à la même époque l’atelier d’Ernest LAURENT (1859- 1929) à Paris, puis l’atelier de fresque de Paul BAUDOUIN (1844-1931), peintre belge, proche de Puvis de Chavannes. Il assiste Paul BAUDOUIN dans la réalisation de la fresque de l’église Sainte-Geneviève de Nanterre.
Jusqu’en 1939, année où il est mobilisé pour partir au front, Louis DUSSOUR a une activité exclusivement artistique, il peint sur chevalet et réalise des fresques. Il expose régulièrement et mène sa carrière d’artiste peintre entre Paris et Riom.
Il participe à plusieurs reprises au Salon du Centre, au Salon des Arts Décoratifs, salon d’Automne et salon des Tuileries. En 1933, il peint le hall de la direction de la Sécurité Sociale à Paris, rue de Dunkerque. En 1937, une de ses principales réalisations est une fresque pour l’extérieur du pavillon du Thermalisme dans le cadre de l’Exposition Internationale des Arts et Technique de Paris. Les sujets religieux représentent aussi une importante part de ses commandes sans les citer toutes en voici quelques exemples : la chapelle de l’évêché de Clermont-Ferrand où il se marie le 27 novembre 1937 avec Marie-Odile JULIEN, la chapelle du collège Massillon, l’église de Ternant et Buron, …
En 1941 à Saint-Priest-des-Champs, Louis DUSSOUR réalise la fresque de l’église représentant le martyre de saint Priest, vingt-huitième évêque de Clermont. Il s’agit de 4 scènes sur un tableau en demi-cercle en haut du cœur où figurent les persécutions dont est victime l’évêque et sur la droite le châtiment divin de ses bourreaux. Ces illustrations, véritables scènes d’action, sont représentées comme dans un décor de théâtre.
En 1942 à la Crouzille (1), l’ensemble du cœur est décoré par le peintre dans le cadre de la rénovation de l’église initiée par le Père SAUTAREL. La fresque de Louis DUSSOUR se développe autour de la statue de Notre-Dame du Rosaire, en pierre polychrome, et représente son couronnement avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit symbolisé par la colombe entourée d’anges et de chérubins. Sur les côtés sont représentés les principaux saints (2). Inspiré par la prière du Rosaire, Louis DUSSOUR illustre sur des motifs géométriques très décoratifs des encadrés avec les trois séries des mystères (joyeux, douloureux et glorieux) et représente plus bas les symboles de la Jeunesse Agricole Catholique (3). A noter : les camaïeux de couleurs ocre et gris, la croisée d’ogives soutenue par les ailes des anges observateurs en rangée. De part et d’autre de la statue de N-D du Rosaire nous reconnaissons saint Ménélé, fondateur de l’abbaye de Menat et saint François de Sale, fondateur de l’ordre féminin de la Visitation, enfin en bas, comme un clin d’œil, sont dessinés l’église de La Crouzille avec son clocher à peigne et le tilleul Sully à tronc ouvert. Louis Dussour offre à la paroisse la fresque située derrière les fonts baptismaux afin de décorer l’emplacement de la porte murée lors de la rénovation de l’église.
En 1943, non loin de La Crouzille, à Ars-les-Favets, Louis DUSSOUR réalise une fresque représentant la Cène dans des couleurs soutenues avec le Christ qui se détache en mandorle. Les 4 évangélistes sont dessinés en grisaille entre les vitraux. Leurs symboles sont dotés d’ailes particulièrement stylisées. On retrouve, ici aussi, des motifs géométriques mais plutôt en forme d’arabesques.
Le 1er septembre 1943, Louis DOUSSOUR est nommé directeur de l’école des Beaux-Arts de Clermont-Ferrand. Parallèlement, il poursuit sa carrière de peintre fresquiste et de chevalet. Il collabore avec des architectes clermontois comme Louis Verdier et Valentin Vigneron pour des commandes privées. Par ailleurs, l’église passe à Louis DUSSOUR la majeure partie de ses commandes : il réalisera entre autres les fresques de l’église de Saint Eutrope de Clermont-Ferrand (1945), l’église de Saint Remy sur Durolle (1947), l’église d’Aulnat, de Rouilas-Bas, et celle du Vernet Sainte Marguerite.
Entre 1948 et 1967, Louis DUSSOUR dirige l’Ecole Nationale des Arts Décoratifs de Nice. Ce nouveau poste lui ouvre d’autres horizons et d’autres inspirations. Ils rencontrent les Maeght, Matisse, Chagall, Le Corbusier, Cocteau. Il reste, néanmoins, toujours fidèle à l’Auvergne et continue d’y travailler sur ses temps libres. Il réalise ainsi la décoration des piscines de Chatel-Guyon et de Riom, la décoration de l’école Jules Ferry à Cébazat et une composition abstraite pour le hall de la sécurité sociale rue Pélissier à Clermont-Ferrand.
Louis DUSSOUR termine sa carrière de pédagogue comme professeur de décoration plane aux Beaux-Arts de Bourges.
Louis DUSSOUR est avant tout un peintre fresquiste, technique ancestrale qu’il maîtrise particulièrement, exigeant talent, travail (toute retouche est impossible) et adresse car souvent réalisée perché sur un vertigineux échafaudage. Dans un article intitulé ‘La fresque’, paru dans la revue Le Peintre n°511 du 15 octobre 1975, Louis Dussour explique particulièrement bien la technique de la fresque et la chimie de la matière rendant la peinture indélébile. Seule la destruction des édifices au gré des remaniements urbains fait disparaître ses œuvres subtiles.
Sa carrière a été récompensée par de nombreux prix (prix Marie Barshkirsteff, médaille d’or de la biennale de Menton) et reconnaissances officielles (commandeur des Palmes Académiques, chevalier des Arts et des Lettres, Croix de guerre).
Nous sommes heureux de pouvoir admirer les fresques dans les Combrailles de cet artiste accompli.
(1) pendant son séjour à La Crouzille, Louis Dussour est hébergé chez M. et Mme. Robin
(2) de gauche à droite : sainte Thérèse, le saint curé d’Ars, l’archange Gabriel, saint Marc, saint Matthieu, Saint François d’Assise, Saint Pierre, Saint Joseph, Sainte Anne, Saint Paul, Saint Louis, Saint Luc, Sainte Jeanne d’Arc, Saint Maurice et Saint Vincent de Paul.
(3) la JAC a offert le vitrail situé à droite de l’autel, vitrail dessiné par Louis Dussour
Sources :
Catalogue de l’exposition : Louis Dussour, peintre fresquiste, exposition présentée par le conseil général du Puy-de-Dôme du 17 mars au 26 avril 1997
Présentation de l’œuvre de Louis Dussour par le centre municipal loisirs et rencontres à Clermont-Ferrand du 5 au 31 décembre 1974
Les amis du vieux Riom, Louis Dussour, La Montagne 21 septembre 2014. Entretien avec Mme Anne-Marie Sol habitante de La Crouzille